Boisé de la Feuillée, une évaluation des dommages est attendue

  • Publié le 10 sept. 2025 (Mis à jour le 10 sept. 2025)
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Les voisins du boisé déplorent que des arbres sains aient été abattus. (Photo Médialo – Jason Joly)
Les voisins du boisé déplorent que des arbres sains aient été abattus. (Photo Médialo – Jason Joly)

La tranquillité qui faisait la renommée du quartier dans lequel se trouve le boisé de la Feuillée, à la frontière entre Saint-Charles-Borromée et Saint-Ambroise-de-Kildare, a été perturbée par des activités illégales d’abattage d’arbres et par la construction d’un chemin non autorisé. Les plaintes et la vigilance des citoyens ont mené à l’arrêt des travaux. Maintenant, c’est au conseil charlois que revient la tâche de trouver toutes les preuves des dégâts occasionnés pour qu’un dédommagement soit réclamé.

« Ça faisait un an et demi que nous mettions le problème devant les yeux de la Ville », indique Suzanne, une voisine du boisé en question. Ce dernier, propriété des Habitations 2G inc., avait été acquis dans l’éventualité d’y créer un développement résidentiel. Des interventions sur le site sont par ailleurs interdites jusqu’au 31 décembre 2031 au minimum.

Cependant, dès 2024, les citoyens du quartier ont observé des coupes d’arbres dans la forêt. « Nous entendions les scies et le cœur nous serrait chaque fois qu’un arbre tombait », se rappelle une autre Charloise qui préfère taire son identité par peur de représailles. « Selon le service d’urbanisme, les propriétaires nettoyaient le boisé et n’abattaient que des arbres malades ou chétifs. Nous constatons plutôt qu’il s’agit d’arbres sains et matures », rapporte France Aubin, qui habite également dans le quartier. Le directeur du service d’urbanisme, Jonathan Rondeau, confirme que les Habitations 2G inc. avaient entamé de travaux de nettoyage l’année dernière : « Mais ce qu’ils ont fait au printemps 2025, et ce que nous avons constaté en début juin, ce n’en était plus. »

De la machinerie était utilisée pour couper et déchiqueter les arbres. (Photo gracieuseté)

Des avertissements ont donc été donnés aux promoteurs pour mettre un terme à leurs opérations, mais ce n’est que depuis la fin août 2025 que ces dernières ont réellement cessé et que la machinerie présente sur le site a été délogée. La Ville assure que ses employés continuent de faire des visites hebdomadaires sur les lieux.

Le maire, Robert Bibeau, s’est dit déçu du déroulement du dossier : « C’est tout de même une forêt privée, donc les propriétaires peuvent faire des interventions, mais ils doivent demander la permission de la Ville. Si, par contre, ils avaient voulu que nous considérions le boisé dans son ensemble, nous leur aurions proposé de faire un plan d’aménagement forestier », déclare M. Bibeau. Cette démarche aurait permis d’évaluer par des experts les arbres à abattre au bénéfice de la forêt.

Chemin et tranchées

En marchant dans la forêt, les résidents remarquent toujours les changements que ces coupes ont occasionnés. La densité de la forêt a été réduite et des tas de buches ont été laissés sur le sol à quelques endroits, tout comme des copeaux d’arbres qui ont été déchiquetés. Une vue qui décourage Marie-Lyne, qui aimait beaucoup s’y promener avec sa famille ou son chien. Elle rapporte qu’un petit chemin naturel avait été entretenu par les marcheurs, mais que ce dernier n’existe plus vraiment en raison de l’abattage. « Nous ne voulions pas bloquer ces coupes parce que nous croyons que c’était notre forêt. Nous voulions surtout que les citoyens puissent profiter du boisé », explique-t-elle.

Les Charlois observent aussi que deux tranchées ont été creusées, l’une permettant à l’eau d’être évacuée dans la rivière L’Assomption. Les résidents constatent d’ailleurs que des zones souvent humides sont pratiquement asséchées. Malgré cela, l’eau s’écoule en continu par les tranchées. « Nous croyons que c’est l’eau de la nappe phréatique qui est rejetée et, dans le quartier, nous avons tous des puits cartésiens. L’eau de la nappe est notre source », estime Marie-Lyne. De plus, France Aubin mentionne que la tranchée qui alimente la rivière se trouve sur le terrain d’une maison qui n’appartient pas à Habitations 2G inc. et qui est située dans une zone à risque de glissement du sol. Questionné sur le sujet, Jonathan Rondeau révèle que des installations comme le ponceau et le fossé qui dirigent l’eau dans la rivière existaient déjà au moment où les promoteurs ont acheté le terrain. « Peut-être qu’avec un apport d’eau supplémentaire [le fossé] se creuse naturellement, mais il était déjà là. » M. Rondeau ajoute qu’au niveau de l’écoulement des eaux, ce sont les règlements du Code civil du Québec qui s’appliquent et non ceux de la Ville

Un chemin d’une dizaine de mètres de largeur a été construit au sein du boisé de la Feuillée. (Photo Médialo – Jason Joly)

Les citoyens dénoncent finalement la formation du chemin, que certains appellent « l’autoroute », par les propriétaires. Le service d’urbanisme s’est rendu sur place pour mesurer cette voie d’une largeur qui oscille entre 11 et 13 mètres. Jonathan Rondeau garantit qu’aucune demande n’avait été acceptée pour faire ce chemin.

Les Charlois ont prévenu le ministère de l’Environnement et celui des Affaires municipales de ces différentes situations. Ils espèrent donc que le dossier sera pris en charge par les instances et que des réactions rapides en résulteront.

Dédommagement

Les résidents attendent maintenant de voir les conséquences qui découleront de ce déboisement non autorisé. Le directeur général de la Ville, Claude Crépeau, mentionne que le dossier suit son cours. Un rapport a été demandé et des photos ont été prises pour documenter le tout. Une aide juridique externe a également été sollicitée pour s’assurer d’avoir un argumentaire recevable. « Nous ne pouvons pas poursuivre des gens et engager des sommes publiques si les informations sont non fondées », informe M. Crépeau.

Ainsi, il est encore trop tôt pour connaitre les dédommagements pécuniaires qui pourraient s’en suivre. La question d’un reboisement imposé aux propriétaires et du chemin construit sans permission reste aussi à être déterminée. Le règlement de zonage de Saint-Charles-Borromée stipule que « l’abattage illégal d’arbres est sanctionné par une amende d’un montant minimal de 500 $, auquel s’ajoute un montant de 100 $ par arbre abattu illégalement, jusqu’à concurrence de 5 000 $. » Toutefois, une évaluation des dommages subis doit être faite par des spécialistes externes et un juge évaluera la sanction selon les preuves fournies par la Ville.

Pour Robert Bibeau, cette affaire a grandement fait réfléchir la Ville sur des questions d’intervention sur des terrains privés. « Il reste qu’il s’agit d’un boisé privé. Les droits individuels face aux droits des personnes avoisinantes amènent la Ville à faire attention à ses décisions. » Malgré cela, le maire promet qu’une surveillance sera maintenue sur le site : « Chaque intervention dans ce boisé devra être approuvée par le service d’urbanisme. »

Contactées par le Journal, les Habitations 2G inc. ont préféré ne pas commenter le dossier compte tenu des procédures judiciaires en cours.

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