Le dossier de l’ancien presbytère suscite des tensions à Sainte-Mélanie

  • Publié le 3 août 2023 (Mis à jour le 29 avr. 2025)
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Mélissa Blouin

L’ancien presbytère de Sainte-Mélanie cause des frictions au cœur de la Municipalité. Le conseil avait annoncé, avant même d’être élu, son intention de rénover le bâtiment afin de le revaloriser et de le rendre accessible au public. Les occupants actuels, dont L’Entraide communautaire, doivent donc quitter d’ici 2024. Cependant, la Municipalité et l’organisme n’arrivent pas à trouver de solutions quant à sa relocalisation. D’un côté, les élus se sentent piégés face à une situation qui semble sans issue et de l’autre, l’organisme n’a pas l’impression d’être entendu.

C’est le 30 juin 2022 que la Municipalité a transmis un préavis d’un an et demi aux occupants de l’ancien presbytère, les informant qu’ils allaient devoir déménager pour faire place aux rénovations. L’Entraide communautaire a alors relevé que le local de l’ancien commerce Mode Plein air pourrait convenir, mais il a finalement été vendu.

La Municipalité a donc proposé à l’organisme d’être relocalisé au sous-sol de l’ancienne Caisse Desjardins. « On présentait cet endroit de bonne foi et un peu naïvement! Oui, c’était un peu plus petit, mais au moins tout était droit et nous avons mentionné aux membres qu’on pouvait les aider à optimiser l’espace », a expliqué le maire, Louis Freyd.

L’organisme, qui avait mentionné son désir de ne plus avoir à composer avec des escaliers, a qualifié cette proposition d’affront, « nous voulions avoir tout sur un même plancher et la première chose qu’ils nous ont montrée, c’est un sous-sol sans fenêtre», a dénoncé le président du conseil d’administration de l’organisme, Didier Pain.  

Une pétition ayant pour titre L’avenir de l’entraide communautaire Sainte-Mélanie est en péril a ensuite été initiée par l’organisme et a circulé au cœur de la Municipalité, alarmant ainsi quelques citoyens. « L’Entraide et ses bénévoles, qui se donnent corps et âme, se sentent abandonné(e)s par la Municipalité et elle a l’impression d’être poussée dans le dos pour déménager. La Municipalité nous a fait une proposition que nous trouvons totalement inacceptable », peut-on lire au cœur de celle-ci.

La Municipalité a jugé qu’il s’agissait de désinformation et a voulu se faire rassurante auprès de la population. Elle a réitéré que son objectif était de soutenir L’Entraide et de l’aider à trouver un endroit qui lui conviendrait davantage. Le conseil a ensuite proposé à l’organisme une propriété qu’il a récemment achetée, une maison de plain-pied, avec un sous-sol et un garage, située au 1270 route Principale.

Une seconde offre

Le prix de vente de cette propriété est de 400 000$, mais la Municipalité a offert de le diminuer à 360 000$ et de payer le capital du prêt, soit 12 000$ par année (puisque le financement se fait en 30 ans). La Municipalité a aussi proposé de cautionner le prêt auprès de l’institution financière, de payer l’inspection du bâtiment et de rembourser les taxes foncières. Ainsi, l’organisme n’aurait qu’à payer les intérêts et les coûts d’entretien.

La Municipalité a jugé cette offre plus que généreuse et a relaté que les villages avoisinants donnent entre 0 et 5000$ annuellement à leur entraide communautaire.

« Nous avons fait le tour des autres municipalités et il n’y a pas d’autre entraide qui reçoit autant. La plupart des municipalités donnent un chèque et c’est l’organisme qui doit se trouver des locaux, payer son loyer et son électricité. On voulait vraiment proposer une belle offre, même si L’Entraide n’appartient pas à la Municipalité», ont ajouté les membres du conseil.

Cette offre a été faite il y a plusieurs mois et la Municipalité déplore que L’Entraide communautaire n’y ait toujours pas donné suite.

De son côté, M. Pain déclare qu’il a posé de nombreuses questions au Conseil qui sont restées sans réponse. « Nous avions un paquet d’inquiétudes concernant le bâtiment et le financement. » Il a concédé que l’offre était bonne, mais a ajouté que l’organisme ne survivrait pas financièrement en devenant propriétaire de l’immeuble. « En raison des intérêts sur l’emprunt, de l’électricité, du chauffage, des coûts de déménagement et d’entretien du bâtiment, nous ne serions plus capables de payer au bout de deux ans. »

M. Pain a ajouté que le plafond du sous-sol est trop bas, que la cuisine doit être rénovée, qu’un ascenseur serait requis et que le garage n’est pas assez haut pour y mettre la remorque. De plus, il mentionne que L’Entraide est prête à payer un loyer, mais que ce n’est pas à son avantage de devenir propriétaire. « Dans les autres municipalités, les organismes sont tous locataires. »

Le président a lancé l’idée d’une nouvelle bâtisse qui pourrait être construite sur un terrain vague, près du presbytère, qui appartient déjà à la Municipalité. « Tout serait construit sur mesure, il n’y aurait donc pas de frais de rénovations et les paiements seraient moins élevés pour nous. »  Ce n’est cependant pas une option pour la Municipalité, puisque le terrain appartient au presbytère et qu’il fait partie de son projet de revalorisation.

Parmi ses souhaits, l’organisme a finalement réitéré celui de rester au presbytère. « Le Conseil veut nous forcer à déménager, il mentionne que la structure du presbytère est trop dangereuse, mais je ne suis pas de cet avis. Oui l’intérieur est craqué, mais nous vivons très bien avec. De plus, il veut rénover le presbytère, mais nous ne savons même pas encore pour en faire quel usage! »

M. Freyd a avoué qu’il ne comprenait pas ce désir de rester au presbytère, puisqu’avant même son élection comme maire, des membres de l’organisme lui avaient parlé de plusieurs inconvénients du bâtiment. Un citoyen a également proposé à M. Pain de lui louer une grande maison adjacente au Manoir Panet, sur la route Principale, afin d’y relocaliser son organisme, mais en date du 31 juillet, il n’avait toujours pas eu de retour quant à cette offre.

Le Conseil municipal juge donc qu’il y a un manque de collaboration de la part de L’Entraide. De plus, la Municipalité devra bientôt revendre la maison offerte à l’organisme si elle ne reçoit pas de réponses. « Nous ne pouvons pas garder cette maison indéfiniment, car nous en avons fait l’acquisition à partir de nos surplus libres. »

Les élus se sentent piégés, car ils jugent leur proposition plus qu’intéressante. « Nous voulons aider et relocaliser L’Entraide, mais ça ne sera pas possible si elle refuse toutes nos offres! On risque de devoir aller en avis d’éviction pour la sortir du presbytère et ce n’est vraiment pas ce que nous voulons. »

C’est pour cette raison qu’ils ont choisi de dénoncer la situation et de distribuer une lettre explicative à tous les citoyens. «L’objectif de ce document est de partager les faits et d’informer la population pour éviter que la machine à rumeurs reparte comme lors de la première pétition. Au moins les citoyens seront au courant qu’il y a eu des offres et que nous avons essayé d’aider. »

Au cœur de cette lettre explicative, il est notamment mentionné que la Municipalité est propriétaire de l’Ancien Presbytère (920 route Principale) depuis 2013 après l’avoir acheté au coût de 150 000$ à la Fabrique. Il est aussi évoqué que la décision de déménager l’Entraide ne vient pas du Conseil actuel, mais qu’elle date d’il y a plus de dix ans. Des citations des anciens maires Yves Beaulieu et Françoise Boudrias ont été ajoutées pour illustrer cet énoncé.

États financiers

En assistant à deux Assemblées générales annuelles (AGA) de l’organisme, le Conseil municipal a aussi constaté que l’offre de la Municipalité n’avait pas été présentée aux membres de l’organisme. Ce qui a également guidé son choix de la partager à tous les citoyens. « En recevant notre lettre explicative, certaines personnes pourraient même trouver que notre offre à l’organisme est trop généreuse, car au final, cela est financé avec leurs taxes. »

Les deux conseillers présents aux AGA ont aussi pu observer que le compte de banque de l’organisme était passé de 70 000$ à 80 000$. « L’accumulation d’argent de cet OBNL, ouvert 8h/semaine, suscite un malaise pour nous. Nous ne connaissons pas sa structure et ne savons pas pourquoi son compte augmente. »

M. Pain a expliqué que ce 80 000$ a été durement gagné par les bénévoles pour les gens dans le besoin et non pour payer un bâtiment. « Au début, nous n’avions pratiquement pas de revenus, mais ils ont augmenté avec le comptoir vestimentaire et les campagnes de dons. Les revenus ont quadruplé et nous avons dû trouver des solutions pour distribuer cet argent, mais cela prend du temps pour mettre en place des programmes. »

L’organisme a notamment décidé de verser des bourses d’études à des Régimes enregistrés d’épargne-études (REEE) à des élèves de Sainte-Mélanie. Le Conseil a déploré que la structure pour la distribution de ces bourses n’a pas été présentée lors des AGA. M. Pain a toutefois mentionné à L’Action qu’il y avait bien une structure et un comité de sélection pour ce projet.

La Municipalité reproche finalement à L’Entraide de n’avoir jamais fait de demande au programme gouvernemental du Soutien aux organismes. Celui-ci permet notamment de subventionner un coordonnateur et le loyer. L’organisme a répondu qu’il est capable de se débrouiller avec ses bénévoles et qu’il n’en a jamais ressenti le besoin. De plus, il stipule qu’il ne serait pas admissible à un soutien financier puisqu’il détient plus de 25% de surplus en revenus.

M. Freyd a terminé en évoquant que si la situation avec L’Entraide communautaire ne se résout pas, cette aide financière pourrait être offerte à une autre Entraide. « Nous voulons vraiment qu’il y ait un service qui continue, ce sera peut-être dans un autre lieu et avec un autre nom, mais on veut continuer à aider la population avec un OSBL encadré qui s’occupera de pourvoir aux besoins des moins nantis. »

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