Tribune libre
Retour12 avril 2018
Vendre son corps
LETTRE OUVERTE. Le premier ministre canadien a suggéré, le 4 avril dernier, la possibilité de décriminaliser la rémunération des mères porteuses, qui est illégale depuis 2004. Et évidemment, comme plusieurs autres pratiques que Monsieur Trudeau souhaite légaliser, c’est complètement insensé.
« L'amour d'une mère pour son enfant ne connaît ni loi, ni pitié, ni limite. Il pourrait anéantir impitoyablement tout ce qui se trouve en travers de son chemin » disait Agatha Christie, écrivaine réputée, mais avant tout, femme. Et c’est bien vrai, personne ne pourra jamais détruire les liens entre un enfant et sa mère, même pas le premier ministre canadien en réduisant ces liens à un échange commercial, comme si la vie portée dans un ventre avait une valeur économique. Et ils peuvent effectivement anéantir tout sur leur passage, car il est possible pour une mère porteuse de garder l’enfant, selon Éducaloi, un site d’informations gouvernementales. D’après le même site, les parents pourraient décider qu’ils ne veulent plus de l’enfant. Une véritable bataille juridique, où tout le monde trouve sa part de souffrance.
Avant d’être une immense transgression au rapport mère-enfant, la gestation pour autrui est synonyme de femme-objet. Bien qu’il soit honorable de faire don de soi, on remarque qu’à travers le monde, plusieurs femmes se tournent vers cette pratique pour des raisons moins louables. « Je ne crois pas à l’altruisme. Dans tous les pays où la MPA (maternité pour autrui) sans rétribution est tolérée, la majorité des femmes sont payées sous la table. La perception de la MPA est en train de changer, ce n’est plus perçu comme quelque chose de moderne, d’altruiste ou de “ cute ”. C’est de l’exploitation pure et simple », confiait la journaliste et auteure Kajsa Ekis Ekman, lors d’une entrevue avec Le Devoir il y a deux ans.
En légalisant la rémunération des mères porteuses, Justin Trudeau affirmerait du même coup qu’il est en faveur de telles transgressions morales. Dans le pire des cas, le premier ministre pourra se déculpabiliser en portant fièrement un ventre en mousse et en s’allouant un congé de maternité, question de bien saisir la situation des mères porteuses.
Camille Grenier
Étudiante en arts et lettres, option Littérature au Cégep régional de Lanaudière à Joliette, 19 ans
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