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20 mars 2024

Jason Joly - jjoly@medialo.ca

Plan d’action de la Ville de Joliette, les citoyens restent sur leur faim

Inondations

Consultation inondations

©Jason Joly - L'Action

Beaucoup de citoyens ont été surpris d’apprendre que le programme d’aide financière servirait seulement à payer une partie des frais d’inspection des installations des eaux usées.

La bibliothèque Rina-Lasnier a récemment accueilli des dizaines de résidents venus assister à la présentation du plan d’action de Joliette contre les inondations. Représentants et partenaires de la Ville ont pu résumer les initiatives mises en place et celles à suivre dans ce dossier qui touche une bonne partie de la population. Malgré cette consultation, plusieurs citoyens sont repartis avec des doutes et de la déception au cœur.

Alors que les inondations du 13 septembre 2022 et du 21 juillet 2023 ont fait des ravages dans les rues et les maisons de Joliette, la Ville souhaitait mettre en lumière certains faits et résumer des initiatives qu’elle compte mettre en place dans ce dossier. Pour ce faire, différents points ont été présentés selon les explications de trois experts.

« Des pluies exceptionnelles »

Même si les deux épisodes d’averses se suivaient sur un court laps de temps, Charles Gratton, conseiller en développement durable du service de l'Aménagement du territoire, a d’entrée de jeu qualifié ces pluies de centenaires. « Elles ont une période de retour de 100 ans, terme voulant dire qu’il y a 1% de chance que cette pluie se produise annuellement », a-t-il précisé en disant qu’il s’agissait « de pluies exceptionnelles ». Selon des recherches d’experts, ce type de précipitations laisserait tomber 70 mm d’eau en deux heures. Toutefois, les changements climatiques tendent à modifier ces données. Les projections montrent que les pluies centenaires produiront à l’avenir des quantités situées entre 120 et 130 mm d’eau en deux heures. M. Gratton a ajouté que les averses vont augmenter en nombre : « Ce sont les précipitations intenses et de courtes durées qui deviennent plus fréquentes. Les pluies automnales, celles qui tombent toute la journée, seront possiblement moins courantes. »

Le conseiller a relaté que 103 mm d’eau sont tombés le 13 septembre 2022, dont 97,5 mm en deux heures. Pour ce qui est du 21 juillet 2023, ce sont environ 115 mm qui se sont abattus, dont 90 mm en deux heures. Plusieurs citoyens ont commenté le fait que ces averses semblent prouver la tendance relevée par les experts, soit qu’elles seront plus fréquentes et donc moins exceptionnelles. Charles Gratton a répondu qu’elles le sont en fait beaucoup plus, qu’elles auraient plutôt une récurrence de 1200 ans pour la première donnée et de 600 ans pour la seconde. Il a révélé cependant que l’exactitude de ces chiffres est à nuancer et qu’ils ne représentaient qu’une image pour expliquer que ces pluies sont plus que centenaires. « C’est aléatoire, ça dépend d’où tombent les cellules orageuses. Nous avons été malchanceux deux fois », a-t-il résumé.

Mettre à jour le Plan directeur

Les résidents attendaient tous impatiemment la présentation du plan de lutte contre les inondations. Pour démontrer les solutions qui pourraient être mises en place, la Ville a fait appel à Marcel Roy, représentant de la firme JFSA, spécialisée en technologie hydraulique. Avant tout, celui-ci a trouvé bon d’illustrer le fonctionnement des réseaux d’égout afin que tous puissent comprendre la cause de ces inondations. Ainsi, M. Roy a expliqué que les égouts sont divisés en deux systèmes : le réseau sanitaire, qui reçoit les eaux usées, et le réseau pluvial qui capte l’eau de pluie. À certains endroits dans la ville, ces conduites sont séparées, alors que pour d’autres secteurs, les eaux circulent dans un réseau dit unitaire. M. Roy explique que le premier type de réseau découle d’une évolution sanitaire. « Dans les années 50, toute l’eau s’en allait sans traitement à la rivière. Nous remarquons aujourd’hui que ce n’est pas l’idéal puisque les réseaux unitaires reçoivent une très grande quantité d’eau et seront surchargés. Malheureusement, le surplus va se retrouver dans vos sous-sols », indique Marcel Roy.

Depuis une dizaine d’années, les nouveaux secteurs résidentiels doivent respecter des directives plus strictes en gestion des eaux pluviales. « Ils doivent maintenant être capables de résister à des événements centenaires. En revanche, vous êtes dans un réseau qui n’a pas été conçu pour résister à un tel événement, dit le représentant de JFSA en s’adressant aux citoyens qui sont, pour la plupart, dans des quartiers âgés. Mais je dois vous dire que les nouveaux réseaux vont aussi avoir de la misère. »

Le directeur des Travaux publics et services techniques pour la Ville, Benjamin Rouette, a renchéri en disant que Joliette possédait pour 135 km de conduites, les plus vieilles datant de 1908. Des travaux sont opérés depuis les années 2000 pour les remplacer petit à petit. Pour le moment, 17 km ont été renouvelés. « Nous investissons 13 M$ par année pour remplacer un kilomètre de conduites », a dévoilé M. Rouette. Ce dernier a souligné que les réseaux unitaires étaient prioritaires puisqu’ils sont plus sensibles au débordement en cas de fortes pluies, mais que ces démarches prennent du temps. « Ce n’est pas possible de remplacer les 50 km de conduites combinées d’un coup », a rappelé le directeur, et ce, pour des raisons financières, logistiques et temporelles.

Un Joliettain venu au micro a mentionné que les réseaux de la ville n’étaient pas les seuls à avoir été surchargés durant les inondations : « Mon drain français est neuf depuis cinq ans, mais il ne pouvait pas faire sortir l’eau parce que la nappe phréatique était pleine à craquer! » En réponse, Benjamin Rouette a reconnu que les pluies qui ont eu lieu à l’été 2023 avaient engorgé considérablement la nappe, mais que cette eau était habituellement évacuée grâce aux pompes résidentielles. Un second citoyen a toutefois pointé que même avec sa pompe, son sous-sol a été inondé. « L’eau est entrée par le trou de ma pompe. J’ai eu 16 pouces en 20 minutes donc la nappe phréatique a réellement un problème! »

Pour le maire de Joliette, Pierre-Luc Bellerose, il est important de cesser de « chercher un coupable et de trouver plutôt des solutions ». C’est dans cette optique que la Ville prévoit mettre à jour son Plan directeur afin de définir les travaux et les secteurs essentiels. Le centre-ville et le quartier Sainte-Thérèse ont été mentionnés comme potentiellement prioritaires, mais d’autres secteurs ont des systèmes plus fragiles encore. « Nous devons établir des choix entre changer les infrastructures qui sont très vieilles ou celles qui sont moins adaptées, reconnait M. Bellerose. Le but est aussi de voir si nous voulons mettre davantage d’argent pour réparer plus qu’un kilomètre de conduites par année. »

En attendant cette nouvelle planification, la Ville a envoyé une demande auprès du gouvernement afin d’implanter des surverses qui agiront en cas de surcharge du réseau. « Nous regardons la possibilité de construire plusieurs trop-pleins pour venir désengorger le réseau unitaire et offrir un certain niveau de protection », soutient Marcel Roy de JFSA. Le maire de Joliette précise toutefois qu’il s’agit d’une mesure temporaire : « C’est juste le temps que nous trouvions d’autres solutions comme l’implantation d’un bassin de rétention par exemple. Ce sera à voir, mais, pour l’instant, le plus important est d’obtenir la permission du ministère de l’Environnement. »

Programme d’aide financière

La Ville a également profité de la consultation publique pour annoncer son programme d’aide financière pour la réhabilitation des systèmes de rejets d’égouts. Applicable à l’ensemble des résidences admissibles du territoire joliettain, il consiste en la couverture de 50 % des frais pour l’inspection et le diagnostic des systèmes, jusqu’à concurrence de 375 $. L’aide financière ne servirait donc pas pour la réparation ou le remplacement des installations, mais plutôt pour connaitre les lacunes des bâtiments. Pour M. Roy, l’inspection et l’entretien sont la clé pour s’assurer d’une protection optimale face aux inondations. « Notre firme a fait plus de 3000 inspections au Québec et sur 10 maisons, seulement deux sont conformes. » Il recommande ainsi diverses bonnes pratiques en matière de gestion des eaux pluviales qui sont répertoriées sur le site de la Ville.

En vue de cette présentation, la plupart des résidents se sont dit très déçus. « On parle de clapets et de drains français, mais j’ai déjà tout fait mes devoirs et je me fais encore inonder! C’est une situation très émotionnelle et coûteuse. On dirait qu’on ne trouve plus de solutions », déplore une dame, qui ajoute que les assurances ne veulent plus les couvrir. Un formulaire était disponible pour une aide financière gouvernementale aux citoyens, mais, selon la résidente, personne n’était admissible puisque les inondations devaient résulter d’un débordement d’un cours d’eau. « Pourquoi vous nous avez envoyé ça si vous saviez que nous n’étions pas éligibles ? » La greffière par intérim, Danielle Simard, a répondu que le gouvernement avait annoncé ce programme et que la Ville voulait en faire profiter la population. Elle a par la suite constaté que la majorité des demandeurs n’étaient pas éligibles, mais que ce n’était en rien la faute de la Ville. Une autre femme a dénoncé que Joliette n’avait pas déclaré l’état d’urgence lors des inondations. « C’est la seule municipalité qui ne l’a pas fait et si nous l’avions fait, nous aurions été éligibles à la subvention. Donc il y avait un manque de votre côté! »

Elle a ensuite poursuivi pour parler du plan d’aide financière qu’elle considère comme « à l’opposé de ce à quoi elle s’attendait ». Elle avait eu comme information que la Ville allait aider à payer les réparations des systèmes résidentiels et non seulement à couvrir une partie des diagnostics. Questionné sur le sujet, Pierre-Luc Bellerose a répondu qu’il voulait rapidement offrir quelque chose à la population. « Nous allons nous réunir pour savoir s’il est préférable de bonifier ce programme, mais nous voulions au moins fournir une aide à nos citoyens. »

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